Le retour de l'hiver en France ?

BIM n°26 du 6 janvier 2013

Après près de 10 jours de calme météorologique, la France comme l'ouest de l'Europe devrait, d'ici la mi-janvier, connaître une période plus hivernale, en d'autres termes un temps plus conforme à cette saison!

La situation actuelle est dominée par un blocage anticyclonique très résistant sur l'extrémité ouest de l'Europe. Voici l'analyse de ce 6 janvier 2013 à 1h locales établie par l'Université de Berlin :

Le fautif est l'anticyclone nommé "XERXES" (à vos souhaits!) par l'Université de Berlin. La zone de hautes pressions empêche les dépressions de progresser vers l'Europe occidentale, les forçant ainsi à suivre la trajectoire indiquée ici en noir. En basses couches de l'air chaud remonte à l'ouest de l'anticyclone et recouvre une grande partie du pays, alors que l'air froid continue à se rabattre sur l'Europe centrale et la Russie occidentale qui grelotte depuis déjà plus d'un mois.

En France ce type de configuration anticyclonique, avec un apport en air humide en marge des dépressions européennes et de l'air doux en altitude qui surplombe un air globalement aussi doux en surface, se traduit par un temps souvent bien gris en plaine (phénomènes résistants par inversion thermique). Cela fait plusieurs jours maintenant que certaines régions n'ont pas vu un seul rayon de soleil. L'image satellite MODIS haute résolution de ce 6 janvier en témoigne bien :

Au cours de cette seconde semaine de janvier à venir, nous devrions enfin connaître un changement avec l'affaiblissement du blocage anticyclonique. Les modèles de prévision sont à présent unanimes sur ce changement, qui devrait permettre à un temps de saison de s'installer. Le début de la semaine restera dominé par ces mêmes conditions que nous connaissons depuis plusieurs jours, même si on notera un léger mieux à partir de mardi, avec le retour de plus larges éclaircies sur bon nombre de régions.

Voici la situation en altitude (géopotentiel à 500 hPa, en couleurs) et en surface (pression au niveau de la mer, en trait blanc) : analysée par le modèle GFS ce 6 janvier à 13h (à gauche), et prévue par le modèle GFS pour le 9 janvier à 13h (à droite) :

La situation actuelle (à gauche) est bien bloquée avec cette grosse bulle rouge qui s'étire du Marc au Portugal et à l'ouest de la France. Les dépressions n'ont pas d'autre choix que de le contourner par le nord. Dans trois jours (72h plus tard), la situation semble déjà se débloquer avec un anticyclone déjà bien affaissée et l'isolement d'une bulle anticyclonique polaire. Dans le même temps, un vortex polaire évolue au sud du Groënland, et porte avec lui plusieurs perturbations, dont l'une est entourée sur la carte. C'est cette zone que l'on va surveiller par la suite, car elle devrait générer un net changement de temps en France. On remarque par ailleurs un minimum dépressionnaire isolé, qui a réussi à percer le champ de hautes pressions. La perturbation associée, de faible activité, devrait toucher le nord du pays entre mercredi et jeudi.

Par la suite le déblocage va se poursuivre avec l'arrivée de la perturbation montrée précédemment. L'anticyclone va complètement se scinder en deux, et les modèles s'accordent sur le positionnement non loin de notre pays de la dépression associée à cette perturbation synoptique. Voici la situation prévue, pour samedi 12 janvier à 13h, par les modèles GFS (gauche) et ECMWF (droite) dans leurs versions déterministe (haut) et ensembliste (bas). La version ensembliste correspond à la moyenne des scénarios du modèle d'ensemble.

 Tant dans les versions déterministes qu'ensemblistes, les cartes sont unanimes sur la présence de quatre grands centres d'action : la dépression D1 associée à la dite perturbation, l'anticyclone nordique A1, ainsi que l'autre partie A2 de notre anticyclone située entre les Açores et l'Europe et la dépression d'Europe centrale D2. L'analyse de ces cartes appelle à deux principaux événements : 1) l'arrivée d'une dépression et donc de précipitations sur une grande partie du pays en raison de la proximité de la dépression, et 2) l'arrivée d'air plus froid par le nord-est en liaison avec le duo A1/D2 qui redistribue la masse d'air froid depuis l'Europe centrale et la Russie vers le nord et l'ouest de l'Europe.

Il est donc probable que le week-end prochain (12 et 13 janvier) des précipitations neigeuses à basses altitudes se produisent dans certaines régions, en particulier du nord au nord-est du pays. Ailleurs il neigera sans aucun doute en montagne, mais en plaine il s'agira encore de pluie.  La fiabilité de la prévision pour ces échéances est néanmoins déjà assez moyenne, comme le montre le scénario proposé par GFS dans sa version déterministe, avec une dépression D1 plus vaste et légèrement plus au nord et un anticyclone A1 plus au nord également. Par ailleurs on notera que les cartes GFS montrent une dépression D1 plus au nord que les cartes ECMWF, avec globalement la même localisation pour les versions déterministe et ensembliste d'un même modèle : on peut raisonnablement penser que cette différence de position est sans doute due aux modèles eux-mêmes et non à la résolution ou aux conditions initiales. D'où l'importance de comparer également plusieurs modèles (plusieurs squelettes), en plus des versions d'un même modèle.

Par la suite, l'hiver pourrait bien s'installer sur une partie de l'Europe occidentale et pourquoi pas sur la France. Ce type de blocage nordique, avec un anticyclone entre Islande et pays scandinaves, est propice aux flux méridiens et donc aux descentes d'air froid en provenance du Pôle ou de Russie. On ne peut pas encore parler de vague de froid, c'est évident, mais des signes de faiblesse apparaissent et laissent penser que la probabilité qu'un bon coup de froid affecte la France devienne non négligeable d'ici la fin janvier.

Voyons les cartes issues des mêmes modèles à plus long terme, à échéance +240h (soit 10 jours) :

On voit que cette fois, les modèles ne sont plus du tout en accord. Les cartes issues de GFS et ECMWF dans leur version déterministe sont complètement différentes, avec des zones de blocage bien différentes. Si on s'intéresse à la moyenne ensembliste de ces mêmes modèles, des conclusions peuvent être tirées. Les deux cartes montrent une dorsale anticyclonique sur le proche Atlantique, qui remonte jusque sur l'Islande. Cette dorsale est tout de même plus prononcée dans la moyenne ECMWF. Le schéma synoptique est d'ailleurs fort ressemblant à la version ECMWF déterministe. On peut donc accorder plus de crédit à ce modèle, qui semble plus consistant que GFS, dont la version déterministe semble à l'écart.

Voici, pour terminer, le diagramme GFS avec les courbes des versions déterministe et ensembliste correspondant à la ville de Paris :

Le diagramme montre bien ce refroidissement jusqu'à la mi-janvier, avec une moyenne plongeant vers -5°C à 850 hPa (courbe noire sur le graphique du haut). On distingue bien également, en bleu, le scénario déterministe du modèle GFS, qui est plutôt à l'écart de la moyenne et ensembliste (et du run de contrôle), avec une masse d'air doux (0°C à 850 hPa).

Pour conclure ce BIM, les prévisions actuelles nous permettent d'affirmer qu'un déblocage est attendu d'ici la fin de la semaine, et que des conditions perturbées seront de retour sur le pays. Des chutes de neige en plaine ne sont pas exclues pour le week-end prochain en fonction du positionnement de la dépression responsable de la dégradation. Par la suite, l'air froid pourrait rester proche de notre pays et risque, d'après les sorties du modèle européen (ECMWF), de toucher une partie du pays après la mi-janvier. Nous suivrons les prochaines sorties avec attention et n'hésiterons pas à refaire un point sur la situation météo.