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25 km/h (raf. 47)Ce texte vous est relayé sur Infoclimat via le blog Itinéraires Polaires, carnet de bord édité par François Gourand, adhérent Infoclimat et hivernant en Terre Adélie en tant que météorologue à Météo-France. Bonne lecture !
C'est juste un autre temps de l'hivernage, et ça m'a fait beaucoup de bien : dès mardi, ça allait tout de même nettement mieux, d'autant que la neige et le vent sont revenus, ce qui m'a permis, comme prévu, de me remettre au pelletage, avec joie. Egalement de service à la météo, je me suis laissé absorber dans diverses tâches administratives peu intéressantes, mais tout à fait appropriées à ma situation du moment. Le soir, après dîner, Julien notre mépré (mécanicien de précision/outilleur) est venu me parler de quelques idées d'habillage graphique pour le grand débat électoral de jeudi soir, ce qui m'a de facto replongé dans notre vie de groupe, mais plutôt volontiers. J'ai par ailleurs discuté des grandes lignes de ce fameux débat avec Régis, qui a quelques idées originales de jeux pour co-animer le débat avec moi.
Aujourd'hui, comme cela m'avait d'ailleurs été judicieusement suggéré par Sarah en début de semaine, je me suis, pour la première fois de l'année, inscrit volontairement au tableau d'absence au déjeuner afin de profiter de ce temps et du temps (clément) pour sortir faire un tour de l'île des Pétrels, seul, au calme, à mon rythme. De toutes façons, nous sommes quasiment au solstice d'hiver, qui aura lieu dimanche 21 matin à 7h44 précises heure DDU (23h44 samedi soir en France)., et donc nous vivons les journées les plus courtes de l'année, et si on veut sortir 2-3 heures dehors à la lumière du jour, il faut sauter le déjeuner fixé invariablement entre 12 et 13h en semaine.
Je me suis donc équipé pour une promenade banquise proche avec une tenue assez chaude, même si les conditions étaient clémentes avec -18°C, et surtout un vent qui était quasiment complètement tombé en début de matinée, après avoir un peu soufflé dans la nuit. L'équipement crucial pour la sécurité est naturellement la radio, puisqu'il faut prévenir quand on quitte la base, en disant où on va se promener, puis prévenir quand on revient sur l'île, bien sûr. Je suis ainsi descendu peu après 10h30 du coeur de la base vers l'abri côtier, par la passerelle, et j'ai mis le pied sur la banquise.
Dans un premier temps, j'ai décidé de rejoindre Régis et Susie qui étaient partis vers la manchotière. J'ai donc longé la piste du Lion jusqu'à son extrémité sud, que j'ai contournée, en me rapprochant de l'île Claude Bernard, où je les ai effectivement retrouvés, devant les manchots, plutôt calmes. Quelques individus se sont cependant extraits du groupe pour se rapprocher de nous, l'un d'entre eux, calme au demeurant, criant de temps en temps, en position de sentinelle, d'après Susie. Après être resté devant les manchots un quart d'heure, j'ai fait demi tour pour commencer mon tour solitaire.
J'ai pris tout mon temps en partant vers le sud-ouest, pour longer l'île des Pétrels par le sud, en direction du mât iono. Comme on le voit un peu sur les photos proposées, la lumière était superbe, avec un voile nuageux sur l'horizon qui n'aura, en définitive, pas permis au soleil si rasant de se montrer. Un bel éclairage sur le glacier, comme souvent, et de beaux contrastes de couleurs. En passant « au large » du mât, je n'ai pas bifurqué tout de suite vers le nord, mais j'ai poursuivi un peu ma route vers la baie Lejay, pour tenter d'aller au point où se trouvait, en 2009, le fameux « trou de pêche » où j'ai passé tant d'heures, à accompagner Céline notre biologiste marine, avec Guigui, Elodie, Caro, Yann…
Un peu au jugé, à quelques centaines de mètres de l'île des Pétrels, du fameux mât iono, j'ai cru repérer la fameuse position, que rien n'indique naturellement, actuellement, puisque le programme scientifique est arrêté depuis des années. Je me suis revu dans de nombreux flashs de 2009, d'autant plus que j'ai revu récemment pas mal de photos et de vidéos que j'avais prises à l'époque à ce lieu particulier. Que c'est drôle de se retrouver ici, au même endroit, mais dans des circonstances finalement si différentes, avant tout parce que je me sens moi même assez différent d'alors. Ca me refait penser aux 10 hivernages, aux plus de 200 hivernants, qui se sont succédé ici, depuis, et qui ont tous vécu leur propre version de cette étrange histoire adélienne. D'une certaine façon, j'en suis également un, autre hivernant !
Après être resté quelques minutes au point supposé, en regardant vers le fond de la baie, plein sud, où le ciel était ostensiblement plus sombre, indiquant la nuit demeurait vers le pôle, même au zénith solaire, je me suis enfin retourné vers le nord, et suis parti vers la pointe nord de l'île des Pétrels, vers le soleil, ou plutôt la lumière du jour, car ce voile nuageux compact au large entretenait cette impression spéciale de jour qui n'est pas parvenu à se lever, pourtant au moment du zénith. J'ai passé la pointe de l'île où j'ai effectué quelques photos en m'écartant encore un peu plus au nord, pas très loin de la vue que nous avions en arrivant, il y a plus de 6 mois, à bord de l'Aurora Australis, mais avec une luminosité éclatante, diamétralement opposée à celle-ci. Antarctique : magie du contraste saisonnier, que j'ai toujours tant aimé.
Je me suis un peu écarté là bas pour voir la base de cet angle moins habituel, mais aussi pour explorer un peu la congère forméé par la pointe de l'île sur des dizaines, peut être même quelques centaines de mètres, où il y a bien à la surface de la banquise une petite couche de neige accumulée, là où, à peine plus à l'ouest, ou plus à l'est, la neige est quasiment totalement soufflée par le vent à la surface de la banquise. Une zone de calme relatif (et de convergence) sous le vent de l'île des Pétrels, bien visible quand la neige est soufflée à la surface de la banquise, on voit bien cette zone assez déventée, où la neige s'accumule donc… Voilà pour la petite curiosité météo du billet !
J'ai enfin bouclé ce tour particulièrement agréable en descendant le chenal du Lion, franchissant d'ailleurs quelques petites rivières, ces fractures à la surface de la banquise, généralement peu dangereuses si on les franchit en les enjambant ostensiblement. J'ai remis le pied sur l'île des Pétrels peu avant 13h, bien heureux de ces quelques kilomètres en solitaire, au cours desquels j'ai bien réalisé, une fois de plus, mais différemment cette fois, la chance que j'avais de me promener dans notre « jardin d'hiver » immense, et blanc, semblant sans limite. Allez, je me focalise maintenant sur le fameux débat électoral de demain soir, ce qui va lancer la Midwinter toute proche !
Posté dans Actualité Météo
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