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Analyse des changements de temps brutaux des mois de novembre
Par Stéphane mardi 24 décembre 2013, 12:00

Cet article est la suite de l'article « les refroidissements du mois d'octobre ». Les liens et images renvoient vers des informations complémentaires. Bonne lecture !

J'ai été un peu surpris de l'enthousiasme qui a fait suite à l'article que j'avais réalisé sur les refroidissements brutaux d'octobre ; c'était quelque chose que j'avais fait assez vite, en partant de l'idée que l'on pouvait trouver de nombreuses chroniques sur les grandes vagues de fraîcheur / froid ou de douceur / chaleur en toutes saisons, mais que je n'avais jamais vraiment vu de chronique dont le sujet central portait sur les changements qui peuvent parfois nous conduire de l'un à l'autre. Je l'avais fait un peu vite (au point d'oublier octobre 2012 d'ailleurs), sans trop le travailler, avec du coup un certain sentiment d'inachevé. Cela a plu tout de même, tant mieux, mais j'aurais quand même pu faire mieux.

Cet article va être l'occasion de me rattraper : nous passons d'octobre à novembre. Et j'en ai profité pour élargir les choses : vous aurez à nouveau dix épisodes de présentés, mais qui correspondent aux cinq plus fort radoucissements et aux cinq plus forts refroidissements brutaux qu'ait connu notre pays en novembre. Plus encore que sur l'article d'octobre, je me suis efforcé à mettre l'accent non pas sur les valeurs de chaud / froid observées, mais bien sur la manière dont on est passés des unes aux autres. Mon but n'étant pas de réciter de manière rébarbative des dizaines de valeurs qui n'auraient été lues que par les plus passionnés des passionnés et alors même que vous pouvez trouver notamment sur HistorIC des milliers de données, j'ai surtout recherché des exemples parlants et permettant de se donner une idée de l'ampleur des événements.

Qui plus est, parce que cela ne gche rien, j'ai essayé de présenter les choses comme j'aurais aimé qu'on me les présente : avec une certaine émotion, un certain sens du suspense, bref pas avec ce caractère un peu plat et sans saveur qui caractérise trop de bulletins de climatologie. Sérieusement, j'ai toujours pensé qu'un jour, si un climatologue professionnel finissait par trouver l'étincelle lui permettant de transformer une chronique climatique en un roman de Stephen King, il serait assuré de faire fortune.

Dans tous les cas, installez vous confortablement, mettez les pieds dans les chaussons, et lancez-vous : vous allez passer un bon moment... Et j'espère surtout que vous prendrez autant de plaisir à parcourir cette chronique, que j'en ai pris à la réaliser.


RADOUCISSEMENT : 5ème place

Le 6 novembre 1966, le vent s'incurve au sud, d'abord par les Pyrénées et le Golfe du Lion, puis accélère en remontant le long du couloir rhodanien. En à peine 24 heures, l'air doux balaie tout sur son passage de la Méditerranée jusqu'aux frontières de l'Allemagne ; on relève plus de 20° par exemple à Bourges et Besançon. Autant dire que la couche de neige qui recouvrait ces deux villes 48 heures plus tôt n'a même pas eu le temps de comprendre ce qui lui arrivait...

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(cliquez sur les images pour agrandir)

Début novembre 1966, à la faveur d'une dépression centrée du côté des Alpes, une vigoureuse masse d'air froid et humide déferle sur le pays depuis le nord est. Témoin de l'intensité de cette advection d'air froid, le mercure s'effondre à -9,6° au sommet de l'Aigoual. En plaine, comme souvent dans ce type de situations dynamiques et perturbées, l’ennuagement et le vent constant limite les fortes baisses nocturnes, ce qui n'empêche cependant pas le gel de se généraliser aux deux tiers nord de notre pays.

Ce qui est beaucoup plus inhabituel pour la saison, ce sont les valeurs maximales relevées en journée qui sont particulièrement faibles pour la saison : on relève ainsi et entre autres un maximum quotidien de 0,4° à Langres, 0,6° à Chteauroux, 0,8° à Besançon, 0,9° à Nancy comme à Metz, et 1,0° à Bourges comme Paris intra muros. 4,0° à Cognac et 5,0° à Montélimar au plus chaud, pas cher payé pour un début novembre ! Sous cette chape, la neige tombe et surprend le pays : plusieurs centimètres s'accumulent en plaine d'abord dans le nord-est, puis le centre, le bassin parisien, le massif central, et jusqu'à Angoulême. Le trafic aérien est interrompu à Orly, et les conditions météo particulièrement mauvaises conduisent au crash aérien d'un avion militaire à proximité de Bercelonnette.

Dans les Alpes, c'est pas moins d'un mètre de neige qui tombe par endroits en quelques heures dans des conditions de véritable blizzard, obligeant les autorités suisses comme françaises à ouvrir en avance les services de suivi montagne pour publier des bulletins d'alerte d'avalanches. Hors de nos frontières, on pourra signaler que l'Italie du nord fait face pour sa part à un épisode de fortes précipitations catastrophiques : les morts se compteront par centaines, le Pô inonde les campagnes jusqu'à Venise et Florence sera entièrement coupée du monde pendant plusieurs jours avec de l'eau jusqu'au premier étage des maisons. Si vous avez regardé l'animation synoptique proposée ci-dessus, vous avez peut-être remarqué le très fort déferlement de sud qui a circulé depuis l'ex-Yougoslavie et jusqu'à la Baltique : cet épisode de vent fort provoquera des dégts très importants en Autriche et en Pologne, où l'on relèvera jusqu'à 216 km/h.

Le 5 novembre, cette vague de froid vit pourtant ses dernières heures : une énorme cyclogénèse se forme sur le proche Atlantique, et le vent bascule subitement au sud. On relève déjà ce jour là 16,6° à Bordeaux et 16,9° à Montélimar alors qu'il ne fera que 4,3° à Strasbourg. En 36 heures, l'air chaud balaie le pays du nord au sud, et déboule jusqu'au nord de l'Allemagne. Vous avez à votre disposition plusieurs graphiques de températures, ils sont éloquents : à Besançon, on a dépassé les 20° alors qu'il avait à peine dégelé l'avant veille. A Lyon, la minimale du 6 novembre dépasse de plus de 7° la maximale de l'avant veille. Vichy enregistre trois jours avec Tm > 15° deux jours après une série de 5 jours avec Tm < 5° :

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On notera cependant que ce très violent radoucissement a surtout concerné l'est du pays, là où le premier déferlement d'air chaud a circulé. J'ai mis pour exemple dans les graphiques les cas de Bordeaux et d’Évreux, où l'on peut constater que la transition a été moins brutale. Cela est du à la trop grande proximité du système dépressionnaire Atlantique, faute de quoi les choses auraient pu être plus généralisées.

Pourquoi je l'ai classé cinquième : la température moyenne quotidienne nationale est passée de 3,3° le 4 novembre à 11,9° le 6 et 12,6° le 7, soit une claque de +8,6° en 48 heures (record!) et +9,3° en 72 heures (seconde place). Ce fut donc clairement un épisode très brutal, mais qui souffre du fait qu'il n'a réellement concerné que la moitié est du pays. Cela n'enlève rien de sa vigueur : le fait qu'il emporte le record de hausse de Tm nationale en 48 heures alors qu'il n'a surtout touché qu'une moitié du pays témoigne de sa puissance. Néanmoins, cet épisode manque surtout de profondeur : on certes passés de valeurs très basses à une grande douceur, mais ces deux périodes ont été assez courtes et pas d'une grande intensité par rapport à ce que vous pourrez voir plus bas dans ces lignes.


REFROIDISSEMENT : 5ème place

Après un mois de septembre inhabituellement doux, octobre 1980 a été sans grand relief sur la France. Un temps habituel d'automne, sur la pente douce qui nous emmène vers l'hiver. Les derniers jours du mois ont néanmoins vu une agréable douceur s'inviter sur le pays, apportant une certaine clémence à l'aube de la Toussaint. Examinons ensemble comment, de ce tableau idyllique, on a pu enchaîner sur la plus puissante vague de froid qui ait concerné notre pays un début novembre.

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Les derniers jours d'octobre 1980 sont relativement doux, sans excès, sur notre pays. Certes, les flux de sud-est commencent à être frais dans le tiers nord est, avec des Tx qui dépassent difficilement les 10° en Lorraine ou en Alsace. Plus au sud, la douceur est bien agréable, avec pas loin de 20° des rivages de l'Aquitaine à ceux de la Provence. On relève ainsi 19,4° à Toulouse, 19,7° à Bordeaux, 19,9° à Marseille le 31 octobre, ce qui est plus que correct une veille de Toussaint. Pour autant, une masse d'air très froide vient de débouler sur l'Europe centrale : ce même jour, il ne dégèle pas dans certaines vallées d'Allemagne, de Pologne et jusqu'en Tchécoslovaquie. Et cette masse d'air froide est déjà en train de pivoter vers l'ouest...

Le 1er novembre, le foehn s'installe et pousse encore le mercure au sud de la Garonne : on relève ainsi jusqu'à 23,8° à Biarritz, 23,7° à Pau, et même 20,6° à Bordeaux. Ce même jour, l'air froid commence à s'infiltrer par la ligne Maginot, avec à peine 6,4° à Nancy au meilleur de l'après-midi, le sentiment de froid étant renforcé par cette bise qui a commencé à se lever. Le lendemain, l'air doux domine toujours au sud, il fait encore 18,1° à Toulouse, 16,4° à Marseille. Quel contraste par rapport au plateau lorrain, où c'est à peine si on arrive au dégel ! Le froid pousse d'ailleurs jusqu'au bassin parisien, il fera à peine 5,0° à Paris intra-muros l'après-midi.

En 48 heures, le froid va déferler sur tout le pays jusqu'aux Pyrénées, plongeant les températures en dessous des normes d'un mois de janvier. C'est surtout dans la moitié sud que le contraste est brutal : à Sète, on passe de 11,9° de Tn le 2 à 6,5° de Tx le lendemain. Carcassonne passe de 11,2° de Tn le 2 à 1,7° de Tx trois jours plus tard. A Bordeaux, on passe de 17,0° de Tx le 2 à seulement 6,6° au plus chaud de la journée le lendemain. Cognac frôle la journée sans dégel le 5 novembre et verra le mercure s'effondrer à -7,5° le 6 (pour vous imaginer la chose, cette valeur n'a été battue que trois fois en novembre, et seulement sur les derniers jours du mois ; le record mensuel d'octobre étant à -3,3°). Dire qu'il y avait fait 18,8° le 1er novembre...

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Le contraste est d'autant plus violent que ce refroidissement est humide : il neige jusque sur les littoraux de Méditerranée et de l'Atlantique. Perpignan est recouvert de 7cm d'or blanc, record de précocité. Il neige également à Carcassonne, à Toulouse, à Montpellier, à Angoulême, à Bergerac. C'est même une véritable tempête de neige que doit affronter la Bretagne, on relève 15 cm à Nantes comme à Brest. L’Auvergne est la région la plus touchée, Clermont-Ferrand est paralysée plusieurs heures par 30 cm de poudreuse.

Pourquoi je l'ai classée cinquième : cette vague de froid précoce, qui détient encore aujourd'hui nombre de records de froid pour une première quinzaine de novembre, n'a été réellement brutale que dans un petit tiers sud-ouest de notre pays. Dans la moitié nord, d'où on partait de valeurs assez banales et où le refroidissement s'est fait de manière plus progressive. Cela n'entache en rien le caractère exceptionnel de cette vague de froid, mais cela lui confère un score de brutalité bien plus faible que les cas qui vont vous être présentés par la suite.


RADOUCISSEMENT : 4ème place

Si je dis « novembre 1985 » … ça y est, je sais que j'ai déjà suscité l'émotion dans le c½ur des plus hivernophiles d'entre vous, qui doivent déjà repenser, la larme à l'oeil, à l'épisode hivernal mémorable que nous avons connu cette année là à l'échelle de tout le pays en milieu de mois. Cela étant, je sais que je vais peut-être leur occasionner une certaine déception, mais je ne suis pas là pour vous raconter comment le froid lié à cet épisode a envahi notre pays. Je suis là pour vous raconter comment on a pu passer d'une seconde quinzaine de novembre parmi les plus froides de notre histoire, à l'une première décade de décembre parmi les plus douces.

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Même si le c½ur de la vague de froid de novembre 1985 se situe en milieu de mois, les deniers jours de l'automne ont encore été particulièrement froids et agités sur notre pays. Même si dans le fond les valeurs absolues de températures observées en 1985 ne sont pas exceptionnelles, c'est surtout dans la durée que le froid a été remarquable. Voir des flocons 10 jours sur les 30 d'un mois de novembre à Paris, ce n'est tout de même pas banal...

Les derniers jours de novembre 1985 ont été marqués par un temps un peu moins perturbé, mais toujours très froid avec un flux d'est en fin de vie mais suffisant pour conserver dans les basses couches tout le froid accumulé les semaines précédentes. On relève ainsi au plus de la journée du 26 des maximales de -0,4° à Reims, 0,0° à Bourges et 2,8° à Dax. Le matin, le gel avait été fort jusque sur les côtes avec -4,1° relevés à St Nazaire, -4,0° à Biscarrosse. Il neige parfois au nord de la Seine et jusqu'aux Vosges.

Le lendemain, sur le flanc sud d'un petit creusement sur les iles britanniques, le vent s'incurve à l'ouest par la moitié nord avec l'arrivée de davantage d'humidité. La masse d'air restant bien froide au sol comme en altitude, de la neige est souvent observée au nord (parfois abondante en Picardie), tandis que la façade ouest et les régions centrales font l'expérience d'un petit épisode de pluies verglaçantes. Au plus chaud de la journée, malgré le retour d'air un peu plus océanique, il ne dégèle que rarement sur la moitié est (0° à Grenoble, -1° à Chatillon sur Seine) alors qu'on arrive péniblement et sous la pluie à 2,4° à Poitiers et 2,5° à Chartres.

28 novembre. Ca y est, le flux est en train d'advecter une masse d'air franchement plus douce par le Sud-Ouest. A Mont de Marsan, où il faisait encore -6,2° à l'aube sous un petit flux d'est, le mercure s'élève jusqu'à 13,1° l'après-midi après la bascule du vent. On relève 10,7° à Bordeaux et 11,3° à Toulouse, alors qu'il ne dégèle toujours pas à Aurillac (-0,7°) toute proche où l'air doux n'est pas encore parvenu !

L'air doux continue de pousser, et finira par atteindre les frontières du Nord-Est au dernier jour de l'automne. Si certaines fois on a l'impression que certaines saisons sont inversées, jamais comme cette année là on aura eu l'impression, le jour d'entrée dans l'hiver météorologique, d'en être en fait sorti.

Dans ce courant de sud-ouest rapide et faiblement perturbé, le mercure s'envole littéralement. Alors que les températures minimales ne descendent parfois que peu ou plus du tout en dessous des 10° dans des secteurs où il ne dégelait pas il y a encore deux ou trois jours, les maximales feraient presque penser à l'été indien. On atteint 22,0° à Montluçon, 19,0° à Troyes , 17,0° à Colmar ou encore 15,2° à Boulogne sur Mer, presque impensable pour un début décembre !

L'oscar revient cependant à l'extrême sud-ouest : le traditionnel effet de foehn se met en place, et la situation vire au mémorable sur le sud de l'Aquitaine : Biarritz enregistre ainsi une Tn tropicale de 20,1° le 3 décembre, suivie d'une Tn de 19,4° le lendemain. A Biscarrosse, avec une Tx de 24,2° le 3, c'est l'été sur la plage. Mais c'est la cité paloise qui va alors réaliser un score impensable, avec une Tx de 27,2°, soit davantage que les normes d'un mois de juillet...

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Pourquoi je l'ai classé 4ème : clairement, le radoucissement qui nous a concerné entre la fin novembre et le début de décembre 1985 est remarquable : passer de températures dignes d'un plein hiver en automne à des records de douceur pour un début d'hiver, ce n'est pas quelque chose que l'on observe tous les jours. Néanmoins, cet épisode manque quelque peu de brutalité : si on a gagné presque 12° de Tm à l'échelle du pays en 5 jours (exceptionnel), l'air doux a quand même mis trois à quatre jours pour balayer tout le pays. Et vous découvrirez, plus bas dans cet article, qu'il existe certains épisodes qui ont peut être été un peu moins intenses, mais bien plus brutaux : prendre 12° en cinq jours c'est déjà quelque chose, mais prendre 10° en seulement trois jours c'est autre chose...


REFROIDISSEMENT : 4ème place

La France, en novembre 1988. La ville de Nîmes est en train de se remettre doucement des inondations catastrophiques qui l'ont défigurée il y a quelques semaines de cela ; heureusement que le mois de novembre a été plutôt clément dans la région. En milieu de mois, il fait même bien doux pendant plusieurs jours, avec un petit goût d'été indien tardif. Pourtant, il n'y a pas que dans les discothèques que s'est levé un vent de folie : il ne faudra que deux jours à la neige pour balayer l'air doux et recouvrir le nord-est du pays. Et deux jours de plus pour qu'elle atteigne … la côte d'Azur.

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La mi-novembre 1988 a été particulièrement douce sur notre pays, même si elle est restée assez loin des records. A Paris, on a atteint les 10° durant 11 jours consécutifs, ce qui n'est pas forcément si courant en cette période de l'année (même si cela l'est peut-être un peu plus de nos jours), tandis que les 20° sont régulièrement atteints dans l'intérieur de la Provence et dans l'extrême sud-ouest. Pourtant, à partir du 17, les choses sont en train de changer. Une goutte froide se préparer à circuler entre l'Irlande et le nord de l'Allemagne, tandis qu'un imposant verrou Atlantique se referme derrière elle.

Néanmoins, dans le flux d'ouest perturbé et pluvieux qu'entraîne cette dépression, l'air reste encore doux sur notre pays. Le 18 novembre, on relève ainsi encore 11,3° à Metz, 12,6° à Evreux, et même 14,7° à Clermont-Ferrand. Pourtant, à l'arrière, une dorsale s'érige en muraille : le courant d'ouest se bloque, et le vent commence à tourner au nord. Et il ne faudra que deux jours pour que ce courant se mue en véritable descente arctique.

L'un des traits des grands changements de masse d'air, c'est qu'ils ont la capacité de rendre totalement inopérants les horaires traditionnels de mesure des extrêmes de températures. Prenez Lille par exemple : le 20 novembre, on y a enregistré une Tx de 2,8° … à 8 heures UTC, soit 7 heures du matin. L'après-midi, il neigeait avec un mercure essayant tant bien que mal de rester dans le positif. Dire que l'avant veille, il faisait encore presque 12° ! Cette incursion froide et neigeuse, qui atteint le Nord Pas de Calais dans l'après-midi, poursuit sa progression dans la nuit, balayant une bonne partie de l'est du pays.

Ainsi à Mulhouse, le 21, la Tx est également enregistrée à 7 heures du matin : +0,4°. Le mercure poursuit sa chute, sombrant dans le négatif l'après-midi sous une tempête de neige qui recouvre la région de près d'un décimètre de poudreuse. La masse d'air est si glaciale que l'on observe même des orages de neige le lendemain, avec une Tx de -4,3°.

A Lyon, alors qu'il faisait encore presque 8° la veille, l'air froid arrive également à l'aube avec son cortège de neige. Le mercure se fige dans le négatif en milieu de matinée, le ressenti étant exacerbé par une bise glaciale, et il y restera pendant trois jours. On relevait pourtant encore 5° en milieu de nuit...

Comme c'est souvent le cas dans ce type de situations, un creusement se met en place sur le golfe de Gènes lorsque l'air froid atteint le bassin méditerranéen, renforçant le courant de nord-est entre Rhône-Alpes et la Provence. Le mistral atteint, et même dépasse, le seuil de la tempête ; accentuant d'autant la progression de l'air froid jusqu'en Camargue et en Basse Provence le 21. Alors qu'il faisait encore 11° à Marseille à 4 heures du matin, il n'y fait plus que 2° le soir avec un windchill proche de -7 du fait de rafales frolant les 100 km/h. A Toulon, on ne dépasse pas les 8° l'après-midi, alors qu'on dépassait les 20° l'avant veille.

Dans ces conditions extrêmement froides en altitude, un retour d'est s'organise : le 22 novembre, St Raphaël se retrouve couverte sous plusieurs centimètres de neige, avec une Tx mémorable en cette saison sur la Côte d'Azur : 5,0° ! Observer des chutes de neige tenant au sol sur le littoral méditerranéen, de manière aussi précoce, reste un cas très rare. Il gèlera même le 25 à Calvi (Tn -0,6°), record de précocité.

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Je n'ai pas beaucoup évoqué le cas de la façade ouest, mais cela provient du fait qu'elle a été moins concernée par ce brutal refroidissement. Cela n'empêche néanmoins pas que les températures sont aussi descendues très bas après une bonne douceur (jusqu'à -8,1° à Mont de Marsan le 22 et -10,4° le lendemain, alors que le 19 novembre on venait seulement d'y enregistrer, avec 14,6°, la première Tx inférieure à 15° depuis le mois de mai), mais la chute s'est faite de manière plus lente et progressive. C'est d'ailleurs ce petit bémol de la façade ouest qui fait que cet épisode ne se classe que 4ème. Si la coulée froide avait davantage concernée le pays, cela aurait pu être franchement mémorable...


RADOUCISSEMENT : 3ème place

Curieux caprices que peut parfois nous réserver la nature, et qui n'ont de cesse de raviver l'étincelle de l'amusement dans l'oeil du passionné de climatologie. Prenez par exemple la station de Metz : son record de la plus basse Txn relevée un mois d'octobre date de l'avant dernier jour d'octobre 1955. Rien de bien particulier me direz-vous. Mais si on rajoute la dessus le fait que le record de la plus haute Txx relevée un mois de novembre a été établie quelques jours plus tard, de suite cela prend une autre dimension.

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La fin d'octobre 1955 est particulièrement froide. Venue d'Allemagne, une masse d'air froid provenant des résidus d'une descente arctique qui s'est produire quelques jours plus tôt traverse la moitié nord de la France. Entre le 29 octobre et le 2 novembre, il gèle presque tous les jours sur l'essentiel du pays. Le mercure s'effondre ainsi jusqu'à -8,9° à Nevers, -7,4° au Mans, -6,4° à Strasbourg, -6,2° à Nancy, -5,6° à Bourges, ou plus rare encore -4,0° à Cognac et -3,9° à Orly. Plus exceptionnel encore pour une fin octobre, on ne relèvera que 2,9° de maximale à Metz le 30, et même 1,1° à Étain dans la Meuse ce qui laisse à penser que certains secteurs de Lorraine ont possiblement connu une journée sans dégel. Dans la capitale, la station de Montsouris ne dépassera pas les 5,5°. Quelques flocons auraient été observés en plaine le 31 octobre, de manière anecdotique.

La matinée du 2 novembre est encore assez froide, puisque c'est ce jour que sont enregistrées les valeurs les plus basses dans tout le centre et l'ouest du pays, mais le radoucissement s'amorce nettement. On relève -1,7° à Paris intra-muros, alors que les 20° sont dépassés l'après-midi dans le Sud-Ouest, et le mercure monte jusqu'à 17,9° à Vichy. Le 3 novembre, on enregistre 16,8° au Mans après les -7,4° de la veille !

Ce radoucissement brutal va s'amplifier, atteignant un sommet entre le 5 et le 7 novembre. Le 5, le mercure ne descends pas en dessous de 10° sur l'essentiel du pays, on relève même 7,1° au plus frais du jour au sommet de l'Aigoual. On note par exemple 12,5° de Tn à Besançon, nouveau record mensuel d'alors : il faudra atteindre 1974 pour battre cette valeur. Le mercure dépasse les 25° dans les Landes et au Pays Basque, et les 15° sont franchis sur tout le pays. Le 7, le pic de douceur est atteint : les 20° sont largement franchis sur tout le Nord-Est, ce qui n'a jamais été observé en novembre depuis lors.

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J'avais parlé de Metz, nous en finiront sur cet exemple absolument remarquable : le 30 octobre, cette station sa relevé la seconde Tn la plus basse d'un mois d'octobre depuis 1950 avec -5,2°, et son record mensuel de Txn avec seulement 2,9° au meilleur de la journée. Quelques jours plus tard, avec 21,2°, on y enregistrait ce qui y reste aujourd'hui encore la seule valeur supérieure à 20° relevée un mois de novembre.

Pourquoi je l'ai classé troisième: La température moyenne quotidienne nationale est passée de 5,6° le 1er novembre, à 14,1° trois jours plus tard, soit une hausse de 8,5°. Cela constitue la 5ème plus forte hausse observée sur trois jours en novembre depuis 1950, on n'est donc pas forcément au niveau des records de brutalité. Cela étant, il faut tout de même noter l'importance générale de ce réchauffement : à l'échelle d'une semaine, on est passé (surtout dans le Nord-Est) de valeurs dignes des records mensuels de froid à des records mensuels de douceur qui n'ont toujours pas été battus plus d'un demi-siècle plus tard et malgré le changement climatique actuel.


REFROIDISSEMENT : 3ème place

Avez-vous su garder ces petits moments de l'enfance qui font que, gourmands que nous sommes, on préférerait débuter un repas par le dessert plutôt que par l'entrée ? Eh bien ici, nous allons commencer par le dessert, justement parce que c'est l'entrée qui est le chef d’½uvre du repas, et que l'on va se la réserver pour un peu plus tard. Nous avançons dans le classement, et je vais vous présenter ici une situation fort originale et peu commune. Tout le monde connaît très bien ces situations bien océaniques où l'on a des dépressions qui parcourent 3000 kilomètres d'ouest en est en une demi-journée. Moi, je vais vous parler de la fois où nous avons eu un anticyclone qui a parcouru 3000 kilomètres dans le sens inverse en 36 heures. Bienvenue en 1983, acte 2.

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Les derniers jours de novembre 1983 sont remarquablement calmes sur la France. Un puissant dôme de hautes pressions, bien positionné sur le centre de l'Europe, dirige un flux de sud très anticyclonique sur notre pays. Bien établi jusque dans les basses couches, il empêche la formation traditionnelle en cette saison d'inversions et le mercure affiche une forme remarquable pour la saison : le 26 novembre, on relève ainsi 17,7° à Toulouse comme à Vichy, 14,9° à Evreux, 16,3° à Nancy, et au delà de nos frontières le mercure grime jusqu'à 14,0° à Berlin et 13,6° à Hambourg.

Bien qu'en légère baisse, les températures restent à des niveaux très élevés sur tous les derniers jours de novembre. Même si à la faveur de la hausse du champ de pression le flux devient de plus en plus faible, la résistance de la couverture nuageuse maintient la douceur au sol. Plus que les maximales, ce sont les températures minimales qui restent remarquables : la Tnm des quatre derniers jours du mois s'élève ainsi à 10,5° à Bordeaux (normale en vigueur à l'époque soit 1951-1980 : 3,3°), 6,5° à Orléans (normale : 1,7°), 5,4° à Beauvais (normale : 1,8°), 6,0° à Strasbourg (normale : 0,8°).

Subitement, le 1er décembre, le vent s'inverse et bascule au nord tout en restant faible. Le dôme de hauts géopotentiels européen vient de se dégonfler très subitement, tandis qu'une dorsale s'élève sur le très proche Atlantique. La claque est surtout sensible au nord-est de la France : il ne fait plus que 2,6° à Beauvais le 1er décembre contre 9,9° la veille, 1,1° à Nancy (6,8° la veille), 4,8° à Chteauroux (10,2°) la veille.

La baisse, lente et régulière, va lentement mais sûrement perdurer les jours suivant. Le 3 décembre, il ne dégèle pas à Strasbourg, on ne relève que 0,1° à Chteauroux. Le lendemain Vichy affiche une maximale de -0,4°, tandis que le mercure tombe à -5,1° à Toulouse, -5,6° à Evreux et -8,8° à Strasbourg.

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Dans l'ensemble, cet épisode de fin novembre 1983 n'a pas fortement impacté les mémoires, principalement parce qu'il n'a pas été accompagné de conditions marquantes comme un épisode de neige ou de verglas. La baisse du mercure, mis à part un palier assez franc entre le 30 novembre et le 1er décembre, a été assez régulière et s'est faite dans des conditions globalement très calmes. C'est peut-être un peu ce qui manque à cet épisode pour le rendre plus remarquable. Et cela limite le nombre de choses que je pourrais vous raconter à son sujet.

Cela n'enlève en rien que de températures dans des seuils records pour une fin novembre, on a basculé dans un temps bien hivernal quelques jours plus tard. D'où une place d'entrée sur mon podium des épisodes de refroidissement brutaux. Avec une chute de 8,4° de la Tm nationale en trois jours et de 10,3° en cinq jours, c'était quand même la moindre des choses...


RADOUCISSEMENT : 2nde place

J'ai passé pas mal de temps à dépoussiérer des épisodes parfois bien anciens, farfouillant entre les différentes données que nous sommes parvenus à rassembler au sein de la communauté amateur et d'autres sources comme les archives des journaux télé ou radio de l'INA. Ici, les choses sont très différentes : je vais vous présenter un épisode très contemporain, que vous avez probablement tous connu, et qui a été débattu en temps réel sur notre forum. Cela m'a permis au passage de prendre conscience de la richesse incroyable de tous ce que vous, membres réguliers ou occasionnels, assemblez chaque jour qui passe. Parce que faire des recherches sur un épisode particulier à partir de seules valeurs sur une carte ou dans un tableau c'est bien, mais s'intéresser à un épisode pour lequel vous pouvez au delà des valeurs (re)vivre le ressenti de ceux qui l'ont vécu, depuis sa prévision jusqu'à son bilan, est quelque chose de véritablement exceptionnel. Et tellement vaste que j'ai du me forcer à limiter le nombre d'informations à retenir, tant le flot m'a paru énorme en parcourant les divers sujets archivés de cette époque.

Cette parenthèse fermée, je vous emmène mi-novembre 2007. Pas pour parler de la grève de la SNCF ou de l'ouverture du procès d'Yvan Colonna, mais du brutal radoucissement que nous avons connu lorsqu'un retour d'est a laissé la place en trois jours à un puissant flux de sud perturbé.

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Novembre 2007 a été un mois globalement bien agité en Europe, avec plusieurs séquences de temps très perturbé, avec des conséquences parfois bien tristes comme la marée noire qui a concerné une partie de la Mer Noire après que deux pétroliers se soient échoués suite à une forte tempête.

En France, le milieu de la seconde décade du mois est dominé par un important retour d'est. De l'air froid déboule par l'est de notre pays, faisant grelotter plus que de raisons les chaumières alors que nous ne sommes encore qu'en automne. Au milieu de la foule de valeurs que j'aurais pu vous citer, j'ai choisi le cas de Biarritz. Imaginez-vous les choses : à Biarritz, le record décadaire de froid depuis l'ouverture de la station était de -1,7° relevés le 20 novembre 1985. Eh bien en 2007, on a relevé -3,4° le 16, -4,9° le 17 et -4,6° le 18. Un record décadaire littéralement pulvérisé trois jours d'affilée, on ne voit pas ça tous les jours.

De manière générale, le mercure est vraiment tombé très bas, en particulier le matin du 17 novembre : -9,2° à Nevers, -9,4° à Brive la Gaillarde, -10,2° à Mont de Marsan ; ce sont des valeurs que l'on ne relève pas tous les jours même au c½ur de l'hiver. Pour autant, les jours de ce coup de froid précoce sont comptés : à l'avant d'une dépression qui glisse depuis le nord vers l'Irlande et le proche Altantique, le vent est en train de tourner.

C'est le 18 novembre que la bascule s'opère par l'ouest : le vent a tourné au sud et se renforce peu à peu. Les relevés horaires en attestent : à la Roche sur Yon, il ne faisait que 0,9° à 11 heures du matin, alors qu'on relève 8,2° à 22 heures. Le redoux pénètre dans l'intérieur le lendemain et atteint la façade est en soirée. A Mcon, on passe ainsi de 2,6° à 8 heures du matin, à 11,5° à 23 heures le soir, valeur d'autant plus remarquable qu'à la même heure il ne faisait encore que 4,9° à Dijon et 4,1° à Beaune un peu plus au nord.

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Le 20 novembre, le vent s'accélère et dépasse le seuil de la tempête sur de nombreuses régions. On atteint ainsi les 90 km/h à Albi, 91 km/h à Clermont-Ferrand, 95 km/h au Puy en Velay, 122 km/h à Millau. Dans ce flux de sud extrêmement dynamique, c'est de coutume, les Cévennes prennent une douche : on dépasse les 300 mm en 48 heures à l'Aigoual avec des rafales relevés jusqu'à 152 km/h. Plus globalement, tout le piémont cévenol atteint ou dépasse les 200 mm sur l'épisode, ainsi que certains secteurs de Provence comme du côté du Lubéron.

Le foehn fait aussi parler de lui côté Pyrénées : les 20° sont localement dépassés au Pays Basque (repensez aux valeurs de Biarritz dont je vous ai parlé un poil plus haut pour bien mesurer tout le contraste !), avec des rafales de secteur sud atteignant 104 km/h à la Pointe de Socoa. On dépasse aussi localement les 20° dans la vallée de la Garonne. Dans ce contexte très agité, les températures minimales nocturnes sont également très élevées : pas moins de 10,0° à St Dizier, 10,1° à Romorantin, et même 13,3° à Lyon Bron la nuit du 20 au 21.

Vous l'avez compris, nous avons quand même vécu un épisode qui mérite franchement de rester dans nos mémoires. Avec une hausse de plus de 9° de la Tm nationale en trois jours, il se classe en seconde position des épisodes de radoucissement les plus brutaux qu'ait connu notre pays en novembre ces dernières décennies. Comme quoi, bien qu'ils ont souvent pu nous paraître ternes et mous, il s'en est passé des choses en automne ces dernières années !


REFROIDISSEMENT : 2nde place

Carcassonne, nous sommes le 15 novembre 1968. Un vent doux souffle sur les murs de la citadelle, et les badauds profitent sur les remparts d'une nouvelle journée bien douce au sein de cet automne qui a été si généreux jusqu'à présent. C'est le troisième jour d'affilée que le mercure dépasse les 15° l'après-midi, et la dernière fois que les 10° n'ont pas été atteints en journée remonte au 7 avril. C'est dire si les dernières effluves de l'été sont encore vivaces. Il ne reste pourtant plus que deux jours avant que la ville enregistre ce qui est encore aujourd'hui son record de la plus basse température maximale relevée une seconde décade de novembre.

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Novembre 1968, à l'aune du milieu de mois. Une puissante dépression stagne sur le proche Atlantique, bloquée dans sa course vers l'est par un immense anticyclone pointé à plus de 1040 hPa sur le sud de la Baltique. Prise en étau à l'avant du système dépressionnaire, la France est balayée par un puissant flux du sud. Ce flux génère d'ailleurs d'assez fortes précipitations sur la Cerdagne et les crêtes des Pyrénées Orientales, avec des cumuls de 60 à 100 mm en 24 heures le 15.

A l'est de nos frontières, une puissante bulle d'air froid à l'origine Russe s'est renforcée dans les basses couches. Elle apporte des conditions hivernales sur l'Europe centrale, qui commencent à toucher l'Allemagne. Glissant vers l'ouest sous le puissant anticyclone balte, elle se prépare à traverser la France. Le 14 novembre dans l'après-midi, l'air froid commence à franchir les frontières du Nord-Est : dans une trentaine d'heures, il aura atteint les Pyrénées et sera en train de pivoter sur le Languedoc.

Le 15 novembre, le mercure chute subitement par l'est du pays. Il dégèle à peine à Langres, alors qu'on approchait encore les 8° la veille. L'air froid atteint le bassin parisien, et jusqu'aux Pays de Loire, tandis qu'un retour d'est humide touche également l'intérieur de la Provence. La déferlante s'accompagne d'une forte humidité, et la neige apparaît. On l'observe d'abord en Alsace, puis en Lorraine ; elle touche Paris le soir – le verglas provoquera d'ailleurs des accidents qui conduiront à la fermeture de la nationale 7 entre Corbeil et Fontainebleau. Impensable pour les habitants du tiers Sud-Ouest, qui ont encore eu une belle journée avec des températures clémentes, mais pourtant ils sont les prochains sur la liste.

Le lendemain, l'air froid pivote et déboule vers les plaines du Sud-Ouest. A Nîmes, la Tn du 15 novembre est de 11,6°, la Tx du lendemain n'est que 5,2°. A Cognac, la Tm chute également de presque 10° en 24 heures. Pendant ce temps, le froid se renforce au nord : il ne dégèle pas dans de nombreuses régions du centre et de l'est, on relève 0,3° à Paris intra-muros l'après-midi. C'était mon exemple d'introduction, Carcassonne enregistre une Tx de 1,3° le 17, ce qui constitue aujourd'hui encore un record décadaire de Txn, pas mal pour la première Tx inférieure à 10° de la saison froide ! Toulouse aussi aurait pu être citée : 18,2° de Tx le 15 novembre, 1,5° deux jours plus tard...

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Au sommet de l'Aigoual, au passage du c½ur froid le 18, la température chutera jusqu'à -12,9°. Parmi les valeurs les plus basses observées en plaine, on pourra citer les -4,9° de Chteauroux avec -2,0° de Tx, les -4,8° de Beauvais (-1,0° de Tx), ou encore les -4,4° de Toulouse. Ce qui marquera plus les gens, ce sont les conditions de véritable blizzard qui auront accompagné cet épisode : plus de 20 cm seront relevés à Belfort, 14 cm à Orléans, 5 à 7 cm sur Paris, et même 12 cm sur la cité Phocéenne !

Pourquoi je l'ai classé second : clairement, on est dans quelque chose de très lourd : la température moyenne nationale a chuté de 10,2° en deux jours, ce qui constitue la seconde plus forte baisse en novembre depuis 1950 au moins. Qui plus est, cet épisode nous a réellement conduit de conditions plutôt douces qui duraient depuis quelques temps, à une vague de froid à la limite du mémorable pour la saison (à Chteauroux par exemple, les -0,3° de Tx du 16 constituent la journée sans dégel la plus précoce mesurée à cette station, sachant qu'on a enfoncé le record avec -2,0° de Tx le lendemain et que deux jours avant il faisait encore presque 15°!).


RADOUCISSEMENT : CHAMPION

Règle climatologique numéro une : quand on arrive sur une seconde quinzaine de novembre, un bon gros anticyclone centré sur les îles Britanniques apportant un net flux d'est dans les basses couches, c'est la recette traditionnelle de grosses inversions froides dans nos plaines. Règle climatologique numéro deux : un flux extrêmement rapide de sud-ouest dirigé par un puissant rail dépressionnaire, cela peut apporter des températures excessivement douces dans une ambiance perturbée sur l'ensemble du pays. Règle climatologique numéro trois : quand en moins de 48 heures on passe de l'un à l'autre, il vaut mieux avoir le c½ur bien accroché. Bienvenue en 1983, acte un.

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Vous connaissez bien ce schéma assez typique de nos périodes hivernales : un noyau de hauts géopotentiels qui s'isole vers Albion, incurvant le flux à l'est sur notre pays. Avec le soleil bas et le refroidissement nocturne, cela se transforme souvent en matinées bien froides, et en après-midi guère plus chaudes surtout lorsque le brouillard refuse de se lever.

En cette mi-novembre 1983, nous sommes parfaitement dans ce schéma. Le mercure est d'ailleurs tombé jusqu'à -11,0° à Colmar et -10,4° à Luxeuil le 15. Le 20 novembre, le froid s'est désormais bien installé dans les basses couches : il gèle sur tout le pays ou presque au petit matin, parfois fortement (-7,8° à Clermont-Ferrand, -4,8° à Beauvais, -4,5° à Périgueux) et le dégel est souvent timide dans la moitié nord (-0,9° à Tours, -0,1° à Metz, 1,1° à Chartres). Typique aussi de ces situations, la présence ou non de brouillard apporte parfois des contrastes saisissants : il ne fait pas plus de 0,7° à Poitiers dans la crasse, alors qu'on relève 10,1° à Cognac à moins de 100 kilomètres de là. Les deux jours qui suivent gardent le même profil, même s'il dégèle plus régulièrement dans nombre de régions.

Le 23 novembre, le vent tourne doucement à l'ouest près de l'Atlantique. Ce n'est encore qu'une petite brise qui réchauffe à peine l'air sur les régions du littoral, pourtant c'est un véritable coup de canon qui s'apprête à être tiré. En attendant, il ne fait encore que 4 à 6° au meilleur de la journée sur l'essentiel du pays.

L'air doux se propage à l'ouest durant la journée du 24 : s'il gèle encore le matin dans un grand quart nord-ouest, le mercure dépasse franchement les 10° l'après-midi. Dans la nuit et le lendemain, tel un obus, l'air doux va déferler jusqu'au Bénélux et au fossé rhénan.

Il n'a ainsi fait que 2,3° au plus chaud de la journée à St Quentin le 24 : il fait 13,5° le lendemain et on relèvera même une minimale de 13,1° le 26. Partout, les relevés racontent la même histoire. A Troyes, il a fait -7,8° le matin du 24, et 13,8° quelques 36 heures plus tard. Saint Dizier relève -5,9° de Tn le 24, 12,1° de Tn le surlendemain. A Vichy, de -4,5° le matin du 24, on passe à 17,7° de Tx deux jours plus tard. A Belfort, il n'a pas dégelé le 23 novembre ; les 10,5° de Tn du surlendemain sont l'une des plus hautes Tn relevées dans cette ville une dernière décade de novembre.

La douceur culminera le 26 novembre, avec des Tn de l'ordre de 11 à 13° sur presque tout le pays et pour des valeurs dépassant les 15° l'après-midi, nombre de records décadaires sont battus. Dans ce flux très vigoureux, il faut toutefois noter les quantités de pluies parfois phénoménales qui s'abattent sur les reliefs de la façade est de notre pays : en deux jours on relève 222 mm au lac d'Alfeld (68), 216 mm à Verrens-Arvey (73), 189 mm à Chézery (01), 185 mm au Grand Ballon d'Alsace, 182 mm aux Gets (74), 178 mm à Vaujany (38), 175 mm à Bellefontaine (39)... Dans la foulée, une tempête balaye une bonne partie du pays le 27 : on relèvera jusqu'à 137 km/h à Langres, 133 km/h à Dieppe ou encore 122 km/h à Lille : c'est dire la brutalité avec laquelle l'air doux a déboulé !

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Évidemment, c'est lui qui occupe la première place du classement des plus violents radoucissements qu'ait connu notre pays en novembre. Même si la moitié sud en a été quelque peu écartée, la brutalité du réchauffement enregistré sur toute la moitié nord est à limite du légendaire. A l'échelle nationale, on a gagné 10,3° de Tm en trois jours, du jamais vu pour un mois de novembre ; c'est équivalent à l'écart entre les normes d'un mois d'avril et celles d'un mois de juillet.


REFROIDISSEMENT : CHAMPION

Bon, je suppose que vous devez atteindre un certain seuil de fébrilité avant de découvrir quel est l'épisode de refroidissement le plus brutal que nous ayons pu connaître en France en novembre... J'hésiterais presque à blablater un peu sur n'importe quoi d'autre, juste pour faire monter un peu la pression ; quel dommage de ne pas pouvoir annoncer « réponse après une courte page de publicité » ! Bon allez, je ne vais pas vous tenir en haleine plus souvent. J'avais parlé, plus haut dans le classement, de novembre 1985, et de la larme à l'oeil que cet épisode avait peut-être rappelé aux plus grands hivernophiles d'entre vous. Et je mesure la déception qu'ils ont pu avoir de me voir évoquer le final de cet épisode, et non son arrivée. Et si on corrigeait ça ?

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Après deux mois déjà marqués par des conditions remarquablement douces en général, le début de novembre 1985 est restée dans la lignée de ces séquences d'été indien qui avaient prévalu les semaines précédentes. En fin de première décade, dans un flux de sud-ouest vigoureux, c'est d'ailleurs non pas l'été indien mais l'été tout court en particulier au sud du pays.

C'est surtout entre le 8 et le 10 novembre que la douceur atteint un véritable pic, avec de très nombreux records battus. Parmi les valeurs de Tx que l'on pourrait citer (la liste est longue) : 27,0° à Dax et 16,9° à Beauvais le 8 ; 21,0° au Puy en Velay et 25,2° à St Etienne le 9, et le summum en Corse le 10 avec 29,8° à Calvi et 31,4° à Solenzara. Dans la moitié nord, ce sont les Tn du 9 novembre qui battent parfois des records : 11,9° à Besançon, 12,5° à Orléans, 13,8° à Cognac.

Pourtant, la douceur vit ses derniers instants : le puissant complexe dépressionnaire à son origine est en train de se décaler vers la Scandinavie et la Baltique où il va se figer pendant plusieurs jours, pendant qu'une dorsale anticyclonique s'élève sur l'Atlantique. Entre les deux, un boulevard à sens unique vient de s'ouvrir...

Comme toujours, c'est d'abord le nord qui est concerné par le brusque changement de masse d'air. A Abbeville, où il faisait encore 14° le soir du 9, on relève encore une dizaine de degrés le matin du 10 : il n'en fera pas plus de 5° au milieu de l'après-midi. A Roissy, le scénario est le même : s'il faisait 16° en fin de nuit le 9 avec un point de rosée à 14°, il ne fera plus que 4° le lendemain au soir avec un point de rosée négatif, signe révélateur du brusque changement de masse d'air.

Sur quasiment tout le pays, la dégringolade du mercure est tellement brutale que les températures maximales relevées le 11 sont inférieures au températures minimales relevées la veille, et parfois de plusieurs degrés ! C'est le cas par exemple à Avord (11,6° de Tn le 10 ; 8,0° de Tx le lendemain avec une belle gelée à -3,2°), à Limoges (9,8° de Tn le 10, 5,8° de Tx le lendemain), à St Etienne (12,4° de Tn le 10, 5,0° de Tx le lendemain), à St Dizier (10,7° de Tn le 10, 4,9° de Tx le lendemain)... On perd, en seulement 24 heures, 10, 12, parfois jusqu'à 15°.

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L'instabilité lié à ce net refroidissement reste néanmoins limitée : on observe quelques averses neigeuses par endroits, mais dans l'ensemble rien de significatif du fait d'une masse d'air très froide près du sol mais pas franchement en altitude (assez inhabituel d'ailleurs pour un flux polaire maritime). Cela n'enlève rien au caractère intense de ce refroidissement : observer sur l'essentiel du pays une chute telle que l'on arrive à avoir des températures maximales inférieures aux minimales de la veille, c'est pour le moins impressionnant. En tous cas, cela mérite franchement la première place du podium en terme de brutalité.

Voila, c'est avec cet épisode que je clôture cette petite rétrospective. J'espère avoir pu vous faire passer un bon moment à la découverte des archives climatiques de notre beau pays, qui malgré son caractère tempéré et plutôt peu extrême sait parfois aussi nous offrir des changements pour le moins brutaux....

Posté dans Actualité Météo
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